Rémi alèm Goulet photographies

Les Floraisons

Textes écrits lors d'une période de convalescence, dans le bar Le Square à Amiens,
tenu, à l'époque par mon ami Claude Vinchon.
Un hommage posthume...

Parmi les choses qui t'effleurent, il y a la sciure de mes lèvres,
une mer de spicules qui t'affrontent rougeoyants,
il y a la palme nubile de cette forêt de mousses,
il y a l'onctuosité palpitante du rêveil sur tes yeux,
une planche de chair clouée sur ta paume
et l'inconnue de mes sens à tes reins.


Des yeux de cygnes se forment
sur les affleurements rocheux,
ils roulent comme des galets
dans nos gorges enrouées.
Ce sont les plis rentrés dans nos chairs
par le regard des autres.


…un écran se forme devant mon regard,
les gens bougent devant moi
mais je ne les reconnais plus.
Leurs visages se dissolvent dans le gris du temps,
c'est une fête de visages roses pâles,
un camaïeu de chair sans signification.


Quand les plis se frottent l'un à l'autre.
Quand ces deux corps couleuvrent l'un contre l'autre.
Quand les chevelures et les langues se louÿsent :
mes deux cabris qui se lovent puis me médusent.


Ce qui vient de tirer une ficelle de mon poumon gauche,
je ne sais ce que c'est.
C'était une ficelle ornementée de dents de requins
soutenues alternativement et qui tout autant alternativement
me lacéraient ce même poumon gauche.
Une ficelle d'une longueur approximative
d'un mètre tirée rapidement par une main inconnue
et qui me laisse exténué.
Un trait me rendant attentif
à ma respiration chaotique
et aux contractions de mon coeur.
 
une langueur
Une pesante langueur qui m'est imposée.
Un poids, un poids qui est d'un poids.
Et dans la rue, un vide…


Maboul,
ce sera le terme aujourd'hui.
Soyons mabouls,
grouillons parmi nos membres,
infiltrons nos nerfs.
Disparaissons dans nos fibres,
filtrons nos graisses.
Creusons, creusons et déglutissons nos désirs.
En malaxant bien, nous finirons sûrement par nous y retrouver.


Hormi des gestes, que pouvons-nous ?
Transis nous le sommes.
Nous sommes attachés à des bribes de nous-mêmes.
Entre des voiles, des potentialités.
Nous ne sommes pas tendus, nous sommes lâches.
Et nous esquissons des gestes nocturnes dans le silence…
quand nous ne sommes pas soulevés par le vent.


"Tête Dhuître" observe la "Sybille de Cum",
il est enfouiné,
il cuit d'une flamme,
c'est un pleur brulant,
une larme qui glisse sur son oeil,
une larme de verre, qui court et se tourne.


…il flappe, il risorlve, il madrule.
Tout en cuivarine est son diamande.
De nouveau il flipule à voulots,
il ancramine et admire
les longs doigts ocre-rougeoyants
de sa molle voisine de table.


il y a en nous des époques furtives,
des relents d'amibes,
des temps à rebours,
des élans de vieillesse qui caressent nos muscles.
(...)
il est en nous des temps barbares que nous n'abolissons pas.


Pendant un certain temps, il s'était épuisé
le vent grouillant de ma gorge.
Qu'a-t'il fallu pour qu'il se taise
Celui-là même que j'ai voulu connaître.
Celui-là,
ce vent.
Un an sans lui.
Un an de vent faible alors que je n'étais
moi-même que brindille.
Un soir de nouveau, il a frêmi.
Sur ce murmure expiatoire, il a soufflé sa cruelle besogne.
(mes trémulations)
Il est là depuis.
En moi.
M'ayant averti qu'il serait toujours là, muet ou non.
Dans la surface de mon bras.
Avant il planait, il m'entourait, me rapait.
Ce coup-ci, il est entré.
J'ai ce vent en moi et il me mange.

Qu'un doigt grâcile et légérement courbée soit
un être pliable et soumis à la volonté d'autrui,
il y aura toujours là pour moi
deux paradoxes qui me stupéfient.

J'appréhende toute confrontation
sauf avec ceux qui me meuvent…
qui me meuvent
en eux.


Mon insatisfaction aboie.


C'est dans mes mains
que j'aimerais entendre
le doux chant de tes pupilles
et sur ta gorge,
je laisserais courir mes cils.